Carl-A. Keller


Que Dieu ouvre votre cœur à sa lumière
pour que vous sachiez quelle espérance
vous donne son appel (Eph. 1:18)


 
Professeur Carl-A. Keller, Le Mont sur Lausanne
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  Religion - Spiritualité - Mystique

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De la prière à la méditation

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Titre De la prière à la méditation : une mystique plurireligieuse
Lieu / Dates Genève : Labor et Fides, 2004
Collation 234 p. ; 21 cm
Collection Petite bibliothèque de spiritualité
ISBN 2-8309-1137-7

Ce livre est le fruit de recherches et de réflexions suggérées par un thème de conférence proposé par les responsables de l'Arzillier, lieu de rencontres œcuméniques et interreligieuses à Lausanne : Prière et méditation dans les religions. La conférence elle-même ne fut qu'une première esquisse, provisoire et lacunaire, de l'immensité du sujet, mais elle a déclenché l'envie de l'approfondir et de tenter une présentation un peu plus pénétrante des données qui différencient et unissent entre elles la prière et la méditation.

Les termes de « prière » et de « méditation » renvoient à deux types d'activités ou d'attitudes religieuses ou spirituelles. On énonce souvent ces termes, prière et méditation, d'un seul souffle, comme deux choses jumelées, sans qu'on sache exactement comment les distinguer. On a vaguement l'impression que les deux forment un tout ou qu'elles sont très proches l'une de l'autre. On sent peut-être confusément que la prière est une sorte de méditation, comme d'autre part la méditation apparaît liée à une certaine manière de faire sa prière. Les deux notions semblent baigner dans un flou douillet qui les embrasse doucement et qui fait qu'il est difficile de s'entendre et de savoir exactement à laquelle des deux un interlocuteur pense. Nous verrons que cette imprécision dans l'emploi des deux termes est compréhensible, peut-être inévitable, parce que la prière passe imperceptiblement à la méditation et que la méditation est constamment stimulée et fécondée par la prière. Prière et méditation ne sont certes pas identiques, mais elles forment uncontinuum.

Face à ces incertitudes, il est indispensable de définir aussi clairement que possible le sens général qu'on entend donner à chacune de ces deux notions, de circonscrire de chacune d'elles les contours les plus idoines et d'en établir un « type idéal », d'en dessiner une image idéale qui dans les faits sera constamment voilée ou modifiée par des facteurs divers, étrangers à sa nature intrinsèque, tout en lui conférant une saveur particulière.

Les deux notions s'élaborent effectivement l'une par rapport à l'autre puisque les deux représentent des variantes d'une relation fondamentale entre l'être humain et une grandeur autre, invisible, une Entité supérieure, divine, universelle, une Réalité ultime ou pénultième.

Comment concevoir la différence entre la prière et la méditation ? Voici une proposition qui va orienter notre réflexion : à l'état pur, « idéal », la prière est une relation dialogique ou duelle, alors que la méditation est unitive, qu'elle tend vers l'union et qu'enfin de compte elle ne se contente que de l'union, de l'identité.

Dans la prière, le sujet priant reste distinct du Divin ou de l'Ultime. Par la prière, il s'adresse oralement ou mentalement à un/une partenaire qu'il sent peut-être présent/e, très proche de lui, mais qui est fondamentalement autre que lui. Cet Autre auquel le sujet parle ou qu'il a dans l'esprit est un « Tu » ou un « Vous », car la prière s'accomplit en principe dans le dialogue de l'être humain avec son Ultime. Dans certaines traditions, surtout dans le bouddhisme, l'Autre est parfois conçu comme un « Lui », puisqu'on s'adresse souvent indirectement soit aux Bouddha, soit à la doctrine ou la Vérité ultime. Nous sommes alors en présence d'une prière qui devient mantra, c'est-à-dire un ensemble de phonèmes, une parole ou un discours chargés de puissance sacrée ; elle n'est plus directement dialogique, elle a perdu de vue le « Tu », mais elle conserve néanmoins sa nature duelle : le sujet humain et la grandeur autre, la grandeur nommée « Il » ou « Elle », demeurent séparés, ils ne coïncident pas.

La méditation, elle, est unitive, elle tend vers l'union, vers l'intériorisation de l'Autre, vers la « réalisation » de l'Entité à laquelle le sujet aspire comme à son Ultime. Par « réalisation » nous entendons le surgissement de l'Ultime dans la personne et la vie d'un être humain, surgissement au cours duquel cet Ultime prend entièrement possession du méditant, le remplit et le comble, si bien que l'humain n'apparaît plus que comme une présence de l'Ultime. Précisons d'emblée que les techniques méditatives de toutes les traditions religieuses proposent à leurs adeptes une telle « réalisation » de la grandeur divine ou ultime qu'ils invoquent, que toutes sont non seulement des voies de prière mais aussi des formes de méditation unifiante. Il convient en effet de répéter qu'aucune tradition ne passe à côté de la nécessité d'offrir à ses adeptes les moyens d'une « réalisation » de l'Ultime.

Prier ou méditer, c'est faire une expérience de libération et de liberté ; ce n'est pas s'enfermer dans un carcan de règles étouffantes. C'est tout au plus, prendre des habitudes et imposer à son corps et à son esprit des gestes et des attitudes répétitifs qui, jalonnant le processus mystagogique, facilitent la progression vers le but ultime. Le but ultime, c'est la réalisation de l'Ultime, c'est être totalement ce qu'on a toujours été.

 

 

©2006-2008 Carl-A. Keller

 

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